journal en commun - ÉTÉ 2024 / N°9

Les parents préfèrent-ils un mode de garde plutôt qu’un autre ? S. Moricet : Cela dépend vraiment du projet des parents. La crèche attire mais les Maisons d’Assistantes Maternelles aussi, car elles sont un mixte entre les deux. Lorsqu’ils choisissent une assistante maternelle, les parents sont employeurs et cela peut les freiner : le contrat de travail, le droit du travail, les indemnités, les parents n’ont pas toujours envie de gérer cette contrainte. Quelles sont aujourd’hui les attentes des parents qui se tournent vers les assistantes maternelles ? K. Foucher : Lorsqu’ils viennent chez moi, j’ai l’impression qu’ils recherchent le calme, la nature, que les enfants puissent faire des activités en extérieur. J’étais ATSEM avant, depuis 30 ans que je fréquente des parents, j’ai l’impression qu’ils sont maintenant très attentifs au bien-être de leur enfant. S. Moricet : Ils ont des attentes sur les activités proposées, sur l’utilisation de la télévision et des écrans. Il faut être en accord sur les valeurs éducatives mais je trouve qu’ils font assez confiance à l’expérience professionnelle de l’assistante maternelle. K. Foucher : C’est vrai ! Les parents sont aussi beaucoup dans la demande de conseils sur l’alimentation, le comportement, le sommeil qui est souvent assez anxiogène pour eux. À partir du moment où ils choisissent de travailler avec moi, c’est qu’ils m’accordent leur confiance. Et quand le cadre général est posé, c’est plus simple ! M. Pénicaut : Dans le cadre d’ateliers que j’anime avec les assistantes maternelles, on revient souvent sur le cadre, être bien au clair avec le contrat, avec le projet d’accueil des parents mais aussi celui de l’assistante maternelle. K. Foucher : C’est vrai qu’ici le débriefing ne dure pas forcément 5 minutes. Les parents prennent le temps de s’asseoir, ce qui permet de parler des choses tranquillement, on évite ainsi les non-dits et les conflits sous-jacents. C’est peut-être la zone de fragilité de ce métier, cette relation forcément particulière avec les parents ? S. Moricet : Parfois, le parent est content d’avoir trouvé une place pour son enfant et l’assistante maternelle ravie d’avoir un contrat mais les deux parties n’ont peut-être pas pris le temps de bien se mettre d’accord. Cela peut engendrer des difficultés. K. Foucher : Oui parce qu’il faut que le courant passe des deux côtés, sauf quand on est contraint de trouver quelqu’un. Lorsque je reçois les parents pour la première fois, je leur présente une feuille avec une grande partie des activités que je peux faire. Il y a aussi mon protocole pour les repas, pour le coucher et en général, quand j’ai tout dit, les parents n’ont plus beaucoup de questions. M. Pénicaut : C’est quand tout cela n’est pas dit que c’est compliqué. Plus on attend pour crever l’abcès, plus ça va être difficile de communiquer, car après c’est l’émotion qui prend le dessus. C’est un sujet dont nous parlons beaucoup avec les assistantes maternelles lors des séances d’analyse de pratiques : comment faire pour aborder les choses qui sont douloureuses ou délicates, comment communique-t-on ? C’est un aspect compliqué, notamment dans le temps du recrutement qui est assez particulier parce que les parents sont employeurs mais ils ont aussi l’impression de passer un casting. K. Foucher : C’est vrai que les parents craignent souvent d’être jugés. Est-ce que la formation des assistantes maternelles permet d’être préparée pour gérer ces notions de communication ? S. Moricet : Lors de la formation, on demande aux futures assistantes maternelles de travailler sur leur projet d’accueil, c’est une base écrite qui permet d’avoir des échanges avec les parents, surtout lors du premier rendez-vous. La difficulté c’est de communiquer sans mettre d’émotion, et de trouver le bon moment, parce que dire les choses entre deux portes, ça n’est pas simple non plus. Je dis souvent aux assistantes maternelles de bien réfléchir à la façon dont elles vont exprimer leurs besoins. Sinon, Loches Sud Touraine propose des ateliers d’analyse de pratiques avec Marièle qui permettent d’aborder toutes ces questions liées à la communication. M. Pénicaut : Oui, c’est l’essentiel de nos échanges. Le travail sur la communication, comment dire sans blesser l’autre, comment bien faire passer un message et être entendue… S. Moricet : Au Relais Petite Enfance, on propose plusieurs matinées gratuites où elles se rencontrent, elles peuvent échanger, des formations sont organisées deux fois par an. Tous ces moments permettent aussi de prendre du recul, de s’enrichir des expériences des autres. M. Pénicaut : Ces temps-là sont vraiment importants, il faut en profiter ! C’est difficile de travailler avec l’humain et ces temps de recul sont nécessaires. Pourquoi, selon vous, la profession se renouvelle-t-elle assez peu ? S. Moricet : Il y a parfois beaucoup de petits contrats ou des amplitudes larges. Quand on se tourne vers une assistante maternelle c’est parfois que l’on embauche à 6h du matin ou que l’on termine à 20h30 donc finalement ça fait des horaires un peu extensibles. Or, le rapport au travail a changé, on aime avoir des loisirs et prendre du temps pour soi et l’activité d’assistante maternelle est très chronophage. K. Foucher : Il faut aussi avoir une habitation adaptée et un agrément suffisamment important pour en vivre. M. Pénicaut : L’autre aspect qui est vraiment à prendre en compte, c’est qu’il n’y a pas vraiment de coupure dans la journée par rapport au lieu de travail. S. Moricet : Les échanges que j’ai pu avoir avec celles qui exercent en Maison d’Assistantes Maternelles confirment cet aspect : elles peuvent mettre une barrière entre vie privée et vie professionnelle. Que diriez-vous à celles et ceux qui seraient tentés par ce métier ? K. Foucher : C’est un travail très positif, et les liens avec les enfants sont très gratifiants. Le partage avec les parents est aussi très agréable. Et puis nous avons un certain confort parce que nous nous organisons comme nous voulons selon le rythme des enfants. Et surtout, c’est sympa de voir grandir les enfants et de participer à leur évolution. M. Pénicault : C’est un métier à part entière et très valorisant. Et quand on est intéressé par le milieu de la petite enfance, c’est aussi intéressant de ne pas dépendre d’une grosse structure. Pour contacter le Relais Petite Enfance le plus proche de chez vous, rendez-vous en page 23 de ce journal. 220 assistantes maternelles exercent leur activité en Sud Touraine, un taux de couverture globalement bon mais inférieur aux besoins dans le Montrésorois. Les nombreux départs en retraite et le fort taux de reconversion de ces professionnelles, presque exclusivement des femmes, résultent d’un même constat : le métier souffre d’un déficit d’image et attire moins. Alors qu’une campagne de communication portée par Loches Sud Touraine circule en ce moment pour valoriser la profession d’assistante maternelle, En Commun vous invite à découvrir les particularités de ce beau métier en pleine évolution à travers l’échange qui suit. Rencontre avec Sandrine Moricet, animatrice au Relais Petite Enfance de Loches Sud Touraine, Karine Foucher, assistante maternelle depuis 6 ans, et Marièle Pénicaut, psychologue clinicienne et intervenante régulière auprès d’assistantes maternelles en Sud Touraine. Les liens avec les enfants sont très gratifiants Découvrez la campagne de com « assistante maternelle, un métier à part entière ! » en page 2 de ce journal. entre générations en commun • été 2024 17

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